Martine Billard: Le verdict, c’est moins de Verts
Avril. 2008 \\ Par Jérôme Lamy

Martine Billard lit dans le vote des Parisiens lors des dernières éléctions municipales la volonté de diluer l’influence des Verts. Démocrate s’il en est, la députée de Paris prend acte. Ce qui ne l’empêche pas de regretter quelques incohérences de campagne et surtout l’absence de service après-vente des Verts durant la mandature. En revanche, elle assume le choix de l’autonomie vis à vis du PS, préférant donner la parole aux citoyens plutôt qu’aux appareils politiques.

Martine Billard, quel bilan tirez-vous des élections municipales à Paris et au niveau national ?
Les résultats nationaux sont assez complexes à analyser, quand on regarde de près. La poussée à gauche est incontestable avec de nombreuses villes ayant basculé à gauche, certaines pour la première fois depuis des décennies. Mais la prime au sortant a souvent joué à plein, quelle que soit la couleur politique du maire. Dans d’autres villes, considérées comme des bastions, l’opposition a quasiment disparu. Les Verts ont remporté quelques beaux succès, avec une quarantaine de mairies gagnées, dont bien sûr Montreuil, souvent à la tête de listes comprenant aussi d’ex-PS ou d’ex-PC, et la gauche alternative. À Paris, le bilan de l’équipe sortante a été plébiscité, avec une prime aux maires de gauche sortants. Dommage qu’il ait manqué un petit plus de dynamique pour gagner les 1er et 5e arrondissements.

Comment analysez-vous le score de Denis Baupin à Paris et le recul des Verts dans la Capitale depuis 2001 ?
Les Verts ont choisi de présenter des listes autonomes au premier tour, comme en 1995 et en 2001, pour que ce soient les Parisiennes et les Parisiens qui arbitrent entre les projets et qui décident des rapports de force au Conseil de Paris pour les six ans qui viennent. Les résultats sont effectivement en recul par rapport à 2001, alors que les Verts avaient obtenu des délégations dans des secteurs très médiatisés, et qu’ils avaient fourni un travail considérable avec des résultats très visibles.
Il n’est jamais facile d’expliquer ce choix de l’autonomie après des années de gestion commune – ce qui n’enlève rien à la pertinence de ce choix, notamment d’un point de vue démocratique. Nous aurions certainement dû présenter une vision de Paris tel que nous le souhaitons plus claire, plus cohérente. Toutes les mesures étaient là, assez finement travaillées techniquement d’ailleurs – ce mandat nous a apporté beaucoup de compétences nouvelles – mais la mise en perspective d’ensemble n'a peut-être pas été assez claire au yeux des électeurs. Sans doute aurions nous dû mieux marquer tout au long du mandat ce qu’était l’apport original des Verts.
Etes-vous surprise par la victoire de Jacques Boutault dans le 2e et par l’ampleur de son score au premier tour ?
Je pensais, comme la plupart des Verts, que Jacques Boutault bénéficierait de la reconnaissance de son travail effectué comme maire de proximité et obtiendrait un score au-dessus de notre moyenne parisienne : dans les 18-20 %. Mais je n’imaginais pas un score approchant les 30 %  même si en étant aux côtés de Jacques Boutault dans la rue pendant la campagne électorale, j'ai été témoin du très bon accueil de ses propositions par les habitants. Le score est donc une belle surprise et c’est rassurant de constater que la présence au quotidien auprès des habitants, les réalisations comme le réaménagement de la rue Montmartre, les améliorations apportées dans le Sentier, le développement du bio dans les cantines, sont à ce point reconnues. Il a su fédérer très largement au premier tour et, suite à la décision du PS de le reconduire en tête de liste pour le second tour, impulser une dynamique qui a permis un score supérieur à l’addition des scores des deux listes au premier tour.

Pourtant, on n’a pas l’impression que Jacques Boutault ait été particulièrement soutenu par l’état major des Verts…
Il occupait une position particulière à Paris, du fait que c’était le seul maire d’arrondissement sortant parmi les candidats Verts. Il a très logiquement développé une campagne très autonome, valorisant les acquis locaux, construite non seulement sur sa qualité d’écologiste (il n’est pas du genre à mettre son drapeau dans sa poche !) mais aussi sur sa stature de maire. Et ça lui a réussi !

Comment expliquez-vous la disparition de la droite dans certains arrondissements de Paris, comme le 2e par exemple ?
Sans polémique inutile, il faut quand même constater que c’est une droite particulièrement caricaturale qui s’est effondrée dans le 2e. Le fait que l’UMP n’ait même pas réussi à  reconduire  M. Lekieffre au Conseil de Paris signe la fin de l’ère Taffin. L’ancienne maire du 2e ne voulait pas de logements sociaux dans son arrondissement, elle a laissé des écoles dans un état de délabrement déplorable… Et son successeur à la tête de l’UMP a continué dans la même voie, celle des ultra-libéraux qui ne veulent plus de la solidarité par l’impôt, tout en affichant des positions très réactionnaires sur les questions de société. Quand le maire UMP du 1er appuyait assez finement la création du centre de lutte contre la toxicomanie de la rue Saint-Denis,  côté 2e M. Lekieffre la combattait de manière tellement caricaturale qu’il a fini par être condamné pour diffamation envers ses gestionnaires…

Comment les Verts se situent-ils par rapport à la nouvelle concurrence du Modem ?
Je ne pense pas que le Modem « concurrence » spécifiquement les Verts. Les scores du Modem, une fois passée la présidentielle et l’attrait exercé par François Bayrou sur une partie de l’électorat de gauche pour contrer Sarkozy, recoupent d’assez près les scores habituels du centre-droit. Et c’est au Modem de régler ses propres problèmes de positionnement politique ! Ce qui pose question aux Verts, c’est plutôt qu’aujourd’hui tout le monde se prétend écolo. D’une part, il y a une vraie prise de conscience, extrêmement positive. Et des évolutions parmi les politiques, même si elles sont souvent tardives, en retard sur l’opinion. Mais la perception des enjeux globaux reste trop souvent limitée. L’enjeu pour les Verts aujourd’hui, c’est de rappeler combien les crises environnementales et sociales sont liées.

Avez-vous été surprise quand Bertrand Delanoë a essayé de nouer des liens Marielle de Sarnez lors de la campagne ?
Un peu, car le discours habituel de Bertrand Delanoë est fondé sur une exigence de clarté sur les projets. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le Modem n’apportait guère de réponses à ce sujet. Il est heureux que la raison l’ait emporté.

La nouvelle équipe de Bertrand Delanoë dessine une perte d’influence des Verts au conseil de Paris notamment aux transports. Etes-vous déçue ?
Nous avons fait le choix de la démocratie. Nous n’avons pas voulu jouer l’influence relative des uns et des autres dans des jeux d’appareils politiques, mais donner le choix aux Parisiennes et aux Parisiens de la dose d’écologie qu’ils voulaient pour le nouveau Conseil de Paris. Leur verdict, c’est moins de Verts. Donc moins d’influence. Je ne peux pas être déçue de la démocratie. Je remarque simplement que les électeurs parisiens ont aussi beaucoup de mal à comprendre le système électoral parisien entre les arrondissements et le niveau central parisien, d'autant qu'aucune élection (municipale, régionale, législative) ne fonctionne de la même façon pour ce qui est des conditions de maintien  et de fusion de liste.  J’espère que nos concitoyens ne seront pas trop déçus de leur choix dans six ans.

Quel bilan tirez-vous du mandat de Denis Baupin comme adjoint aux transports ?
Beaucoup a été fait et beaucoup reste à faire, car Paris partait de très loin. Par exemple, sur la question des livraisons, question très sensible dans le Centre de Paris, aucune réflexion n’était engagée avant 2001. Denis Baupin a dû créer les outils, obtenir les postes pour lancer le travail. L’action de la municipalité parisienne sur les transports reste entravée par le caractère très partiel de la décentralisation. Nous revendiquons le passage de l’ensemble de la voirie sous la responsabilité de la Ville, alors que l’État conserve, par le biais de la préfecture de police, le contrôle des axes principaux. Et nous avons bien vu toutes les réticences à laisser aller jusqu’au bout le passage du Syndicat des transports d’Ile-de-France de l’autorité de la préfecture de région à celle du Conseil régional. C’était pourtant essentiel pour donner aux élus le pilotage des projets de transports en commun à l’échelon pertinent : le devenir des transports à Paris passe par le développement des transports de banlieue à banlieue. C’est une question qui a bien été portée par Denis Baupin, mais les moyens d’action sont arrivés très tard dans la mandature.
Pour ce qui est directement de la responsabilité de la Ville, les couloirs de bus, le tramway ont constitué des avancées certaines. Ce qui est symptomatique de la nécessité de faire évoluer les mentalités, y compris pour obtenir les arbitrages nécessaires au sein d’une majorité diverse, c’est qu’il a fallu attendre l’arrivée massive des Vélib’ pour convaincre de la justesse des demandes de pistes cyclables et des contre-sens cyclables. À propos de Vélib’ il est regrettable que le maire de Paris ait arbitré en faveur d’un contrat liant vélos en libre-service et publicité. Nous avons vu de suite les complications juridiques que cela pose pour l’extension à la proche banlieue, et sur le fond, rien ne justifie ce cadeau aux publicitaires.
Il y a des problèmes de stationnement pour les personnes âgées en bas de leur domicile et pour les artisans. Y-a-t’il des solutions ?
Vous me donnez l’occasion de rappeler que les Verts veulent diminuer l’utilisation de la voiture, l’éviter lorsque c’est manifestement inutile, mais pas la supprimer dans les cas où elle reste indispensable, que ce soit pour des raisons professionnelles ou pour du fait de problèmes de mobilité liés à l’âge, au handicap, à la maladie…
Pour les artisans, c’est bien de leur avoir accordé le stationnement résidentiel près de leur atelier, mais leur travail les amène forcément à se déplacer dans toute la ville. Une carte spécifique beaucoup plus large aurait sans doute été plus adaptée pour leur permettre de stationner près des clients chez lesquels ils interviennent.
Pour les personnes âgées, j’entends régulièrement des personnes faire état de la difficulté à passer prendre un parent ou un grand-parent qu’il faut prendre le temps de faire descendre du véhicule, accompagner jusqu’à son appartement… La question demande à être sérieusement travaillée car il nous faut trouver une réponse satisfaisante à cette question.

Vous êtes députée de la première circonscription de Paris depuis 2002. Vous avez été brillamment réélue en juin dernier. Quel bilan tirez-vous de votre action à l’Assemblée Nationale ?
Il est bien évidemment frustrant de siéger dans l’opposition deux mandats de suite, qui plus est dans un pays dans lequel le Parlement est aussi mal traité par le gouvernement… Mais cela ne doit pas nous empêcher de travailler et d’être présents en commission et en séance autant que possible. Le débat sur les amendements, même quand ils sont systématiquement repoussés, oblige le gouvernement à apporter des précisions qui seront prises en compte dans l’établissement de la jurisprudence. C’est très important. Et, constatant à quel point la sociologie des députés laisse peu de place à la connaissance concrète de la situation des salariés du secteur privé, je considère d’autant plus nécessaire d’apporter dans les débats un éclairage sur des réalités ignorées de la plupart de mes collègues. Le niveau de méconnaissance des dispositifs de lutte contre l’exclusion, les fantasmes sur les précaires et les chômeurs sont aussi effarants ! La paranoïa anti-fraude atteint des sommets – sauf quand il s’agit de fraude fiscale.
Durant mon premier mandat, j’ai aussi eu l’occasion de travailler sur des sujets qui ont abouti à un relatif consensus. Secrétaire de la mission d’information sur la fin de vie et les droits des malades, j’ai regretté que la loi Léonetti n’aille pas plus loin, mais j’ai apprécié le fort consensus sur le compromis qu’elle réalisait. Dans le cadre de la mission d’information sur l’effet de serre, j’ai pu mesurer la prise de conscience du bilan – parmi les membres de la mission – même si je trouvais les propositions trop limitées. Mais par contraste, l’incapacité de l’ensemble de la représentation nationale à en tirer immédiatement les conséquences, par des textes de loi permettant la mise en œuvre concrète des conclusions de notre rapport, était d’autant plus insupportable.
Enfin, il est parfois possible de faire passer quelques amendements très utiles. Dans la loi de santé publique, c’est grâce à l’aide technique de Pierre Meneton, chercheur à l’Inserm, que j’ai pu faire passer la limitation du sel dans les plats préparés. Et j’ai bien entendu soutenu Pierre Meneton lors du procès que les industriel du sel et de l’agro-alimentaire viennent de lui intenter – et qu’il a gagné !

Quel est votre rôle à l’Assemblée Nationale et comment représentez-vous les résidents de la première circonscription de Paris ?
Le mode d’élection des députés nous place devant un grand paradoxe : nous sommes les élus de la Nation, et nous sommes élus sur la base territoriale de la circonscription. Notre rôle repose sur trois piliers : représenter, légiférer, contrôler le gouvernement. Mais lorsque nous écrivons la loi, nous sommes censés nous référer à l’intérêt général, pas aux intérêts particuliers de la circonscription dans laquelle nous avons été élus ! D’un autre côté, les situations concrètes qui nous sont exposés lors de nos permanences en circonscription nous sensibilisent à des problèmes. Je ne me serais peut-être pas investi de façon aussi précise dans les débats sur le logement et les ventes à la découpe, si je n’avais pas été en contact avec les collectifs de locataires qui luttaient contre ce fléau dans le centre de Paris. De même, ma connaissance des dysfonctionnements des Assedics, de l’Anpe, de la Caf… se nourrit des dossiers individuels sur lesquels j’interviens.
J’apprécie que vous parliez de résidents et pas seulement d’électeurs, car je pense nécessaire de porter aussi la parole de celles et ceux qui sont exclus du droit de vote. L’extension de ce droit, au moins au niveau local, à toutes et tous sans discrimination par la nationalité fait partie de nos priorités institutionnelles. Et sans attendre, il est possible de porter la parole de ceux qui ne peuvent voter.

Comment jugez-vous le Grenelle de l’environnement ?
Le premier mérite de ce Grenelle, c’est d’exister ! Il est incontestable que le Grenelle a permis des avancées dans le partage du diagnostique, ce qui est une première étape indispensable. Le vrai problème, c’est maintenant la traduction concrète. Il faut mobiliser un minimum de moyens matériels. Quand on a vidé les caisses de l’État par des cadeaux fiscaux, que reste-t-il pour agir ?

La droite ne s’est-elle pas emparée d’une question souvent oubliée par le PS ?
Les Verts ne peuvent que regretter qu’une telle initiative n’ait pas été portée par le gouvernement Jospin, avec d’autres ambitions pour la traduire en actes. D’un autre côté, même s’il reste à gauche des tenants d’un scientisme étroit qui continuent de nier les problèmes environnementaux, les esprits évoluent tant au PS qu’au PCF d’ailleurs. Mais il reste du travail pour les écologistes !

Les récents événements de la rue de la Banque ont encore montré qu’il y avait de gros problèmes de logements à Paris. Y-a-t’il une solution ?
Les problèmes de logement ne concernent pas que Paris, même s’ils sont particulièrement aigus en Ile-de-France. Il faut reconnaître que personne n’a anticipé les évolutions démographiques et de société, notamment les divorces qui font que les familles ont besoin de plus d’appartement de grande taille pour gérer les gardes alternées. Il faut donc construire. D’un point de vue écologiste, ne plus construire n’importe comment : nous avons besoin d’un habitat assez dense, rapprochant le travail du logement, avec de bonnes dessertes en transport en commun, une conception des logements et une isolation qui limite drastiquement les consommations d’énergie. C’est bon pour la planète et bon pour le pouvoir d’achat !
Mais construire prend du temps. Le gouvernement refuse d’utiliser les outils qui sont à sa disposition : blocage des loyers pendant quelques années (compte-tenu des augmentations récentes, ça ne pénaliserait pas les propriétaires !), réquisition des logements vacants appartenant à de « grands » propriétaires… Au niveau local, il faut bien sûr continuer à préempter. Mais cela devient de plus en plus difficile sur des immeubles entiers et ces achats d’immeubles complets sont assez peu « rentables », puisqu’ils sont rarement vides. Il faut donc développer le logement social « diffus », en achetant des lots d’appartements. Bien menée, cette politique peut permettre de peser sur le marché immobilier pour freiner la spéculation, et fournir beaucoup plus rapidement des logements disponibles pour les demandeurs.
Les Verts n’ont pas de groupe au palais Bourbon. N’est-ce pas trop difficile de se faire entendre sa petite musique?
Avec le mode de scrutin majoritaire, les Verts n’ont jamais obtenu les vingt députés nécessaires à la constitution d’un groupe à l’Assemblée. Mais le problème principal, ce sont les droits de l’opposition, et les droits du Parlement ! Quand le règlement n’est même pas respecté pour ce qui concerne les délais de présentation des textes, quand les ministres vous renvoient à la presse pour apprendre le contenu des textes sur lesquels le gouvernement travaille, il est difficile de se faire entendre… même pour les députés de la majorité !
Vous êtes membre de la commission des affaires sociales. Comment jugez-vous le recul du gouvernement sur le RSA ?
Nous en revenons à la question du financement des mesures. Il n’est arithmétiquement pas possible de satisfaire les contribuables les plus aisés et de dégager les moyens d’une politique ambitieuse, que ce soit au plan environnemental ou social, surtout dans un contexte de crise financière mondiale. Il faut réhabiliter l’impôt ! Ce qui ne dispense pas d’une réforme qui aboutisse à plus de justice fiscale, par ailleurs.
Le gouvernement s’est engagé dans une forte contradiction en prétendant mettre en œuvre le RSA tout en tenant des discours idéologiques violemment anti-pauvres. Le RSA tombe, le discours « anti-assistés » reste. Je me demande ce qui va retenir Martin Hirsch au gouvernement…
Quelle est votre religion sur les 35 heures présentées par la droite comme le grand mal du début de siècle ?
Vous permettrez à la laïque convaincue que je suis de ne pas reprendre le terme de « religion » à mon compte. La diminution du temps de travail est une revendication historique du mouvement ouvrier. Et ce pour des raisons de santé. Or aujourd'hui nous assistons à une régression qui consiste à dire que pour obtenir un salaire suffisant pour vivre, il faut travailler toujours plus. Il faut mettre les choses au point, quand la droite prétend qu’on travaillerait peu en France. Comment pouvons nous produire autant, en travaillant « si peu » ? Les salariés français ont tout simplement une des meilleures productivités et une des plus grandes intensités au travail au monde. D’autre part, vous remarquerez que l’UMP fustige les 35 heures, mais se garde de les abroger. Si le gouvernement cédait aux demandes du Medef d’en finir avec la durée légale du travail, et donc de ne plus avoir comme limite que les 48h hebdomadaires que l’Union européenne fixe comme garde-fou, il n’y aurait plus d’heures supplémentaires défiscalisées… et donc, la fin du discours sur le « gagner plus ».

Vous avez souvent participé aux luttes féminines. Quel est votre regard sur la place de la femme dans la société en général et en politique en particulier ?
Lorsque je rencontre des jeunes, notamment autour des manifestations du 8 mars, j’essaie de leur faire mesurer le chemin parcouru depuis les années 60. Mixité des établissements scolaires, contraception, avortement… Ce chemin doit être mesuré, mais en même temps, la fragilité des conquêtes face à tous les partisans d’un ordre moral doit être perçue. Il est encore nécessaire de se battre.
À l’Assemblée Nationale, malgré les lois sur la parité, nous ne sommes que 18,5 % de députées. Nous n’avons qu’une vice-présidente de l’Assemblée, et je serai dans le cadre de la présidence tournante du groupe GDR, la première présidente de groupe de la Ve République ! Et si la loi oblige désormais les exécutifs municipaux d’être paritaires, qu’en est-il des délégations ? La délégation aux droits de femmes, à l’Assemblée, a encore de beaux jours devant elle !

Avec le recul, comment jugez-vous la campagne de Ségolène Royal ?
C’est forcément un regard extérieur et critique. Je lui reconnais d’avoir relativement bien intégré les données environnementales, même si l’on ne peut que préférer Bruno Rebelle dans le texte ! Sur les questions sociales et de sécurité, j’ai été frappée par sa dérive et son ambiguïté par rapport aux propos de Sarkozy.

Une femme présidente de la République, c’est un rêve ou une utopie ?
Sûrement pas, même si ce n’est pas une fin en soi. Je préfèrerais un président écolo à une présidente réactionnaire et productiviste. Mais pourquoi pas une présidente avec laquelle je serais politiquement en accord ? Et, s’il faut un peu d’utopie, pourquoi pas le basculement vers un vrai régime parlementaire et la fin de l’obsession présidentielle ?