José Bové sème la biodiversité
Novembre. 2008 \\ Par Jérôme Lamy

“Jacques, tu es un receleur de biodiversité. Tu es le Jacques Mesrine du 2e arrondissement.” En remettant, le lundi 27 octobre dernier au gymnase Jean Dame, en présence de 400 personnes, au maire du 2e, des sachets de semences fermières (semences sélectionnées par l’industrie semencière mais multipliées à la ferme) et paysannes (semences sélectionnées et reproduites à la ferme), José Bové a fait montre de sa gouaille habituelle et de ses formules décapantes. Et comme Jacques Boutault ne manque pas d’humour, il a répondu : “Aucun problème, je ne passe pas la Porte de Clignancourt, c’est interdit au vélo là-bas.”

Au delà de la joute verbale entre les deux hommes, la scène a marqué une balise dans la lutte contre le fichage génétique et la privatisation du vivant. “La désobéissance civile est notre seul outil” a dit José Bové. “Tous les échanges de semences paysannes, même à titre gratuit, sont interdits par la législation française alors qu’ils sont indispensables à la survie de la biodiversité cultivée par les paysans. Par ailleurs, les paysans qui ont récolté dans leurs champs ces grains de blé refusent de payer des royalties à l’industrie semencière : ils sont de ce fait coupables de contrefaçon et toute personne acceptant de recevoir ces semences devient coupable de recel d’une contrefaçon.”

José Bové à Jacques Boutault: ”Tu es le Jacques Mesrine du 2e arrondissement !”

Le lendemain, c’est Denis Baupin, maire adjoint de Paris chargé du Développement Durable, de l’Environnement et du Plan-climat, et Fabienne Giboudeaux, adjointe au Maire de Paris en charge des espaces verts, qui ont accepté les sachets sur le parvis de l’Hotel de Ville. Du coup, Giboudeaux, Boutault et Baupin se sont associés, à travers une déclaration commune avec le collectif Semons la biodiversité, au mouvement des semeurs volontaires de biodiversité. Ils ont exigé une évaluation indépendante et contradictoire des risques des OGM sur la santé, l’environnement et les agricultures paysannes, biologiques et de qualité.
Denis Baupin et Fabienne Giboudeaux se sont engagés à soumettre cette délibération au vote du prochain Conseil de Paris de novembre, quand  Jacques Boutault s’est lui aussi engagé à présenter cette délibération lors du prochain Conseil municipal du 2e arrondissement.
“En conservant, en semant, en multipliant, en échangeant et en vendant des semences de variétés paysannes libres de droit, non mutées ni manipulées et non inscrites au catalogue officiel, nous  contribuons au renouvellement indispensable de la biodiversité cultivée” a expliqué José Bové. “En outre, nous garantissons l’existence d’agricultures paysannes et biologiques seules capables de nourrir et de refroidir la planète, défendons notre droit à une nourriture suffisante, de qualité et à la souveraineté alimentaire, devenons volontairement receleurs et diffuseurs de variétés paysannes interdites par des lois illégitimes”.
Avant le discours de la figure à moustache du mouvement altermondialiste, Christian Velot (enseignant chercheur en génétique moléculaire), Jürgen Binder (apiculteur allemand), Jacques Testart (critique des sciences) et Guy Kastler (paysan) avaient participé à une réunion publique ô combien intéressante concernant l’évolution du paysage semencier, l’évaluation de l’impact des OGM et le droit des paysans. Et pas seulement celui d’être des désobéïsseurs officiels...