Salah-Eddine Benhammane : Il faut ouvrir le débat du all inclusive, à Agadir
Octobre. 2014 \\ Par Jérôme Lamy

Salah-Eddine Benhammane, président du crt de la région agadir Souss Massa Draâ, entend ouvrir le grand débat  du all inclusive, à Agadir. Il espère aussi convaincre les investisseurs de se positionner sur l’offre de restauration et d’animation de la station balnéaire

Salah-Eddine Benhammane est un homme pressé. Élu, au printemps 2013, président du CRT d’Agadir Souss Massa Draâ, il est responsable d’un secteur très vaste et varié entre Agadir, Ouarzazate, Zagora et Taroudant. Il ne compte plus les kilomètres, ni les problèmes à régler. Et comme Salah-Eddine Benhammane est, aussi, Directeur Général région sud de la chaîne Atlas Hospitality, à Agadir, (Royal Atlas, Atlas Amadil Beach, Altas les Almohades, Atlas Marina & spa et les Dunes d’Or depuis la cession des actifs hôteliers de FRAM au groupe  Atlas Hospitality), son emploi du temps est chargé. Celui qui a pris la succession d’Abderrahim Oummani avance avec la réputation d’un des dirigeants les plus brillants de la station Agadir. C’est au Royal Atlas qu’il nous a reçus pour un entretien aussi riche que les atouts touristiques de la région d’Agadir.

Clin d’œil.- Après une année 2013 très positive, quels sont les indicateurs de 2014 ?
Salah-Eddine Benhammane.- 2013 restera l’année qui nous a permis de sortir du marasme. Ce regain d’activité se résume en l’augmentation de 10,3% du nombre de nuitées. Les nuitées, c’est la valeur économique fondamentale de notre activité. Les arrivées, en revanche, nous permettent de comprendre le comportement de chaque marché. Pour 2014, si on arrête les statistiques à fin septembre 2014, les arrivées ont augmenté de 5,29% et le nombre de nuitées de 4,49%. Le marché national s'est amélioré, lui, de 3,06% pour le premier indicateur et de 7,68% pour le second.

Que manque-t-il à la destination Agadir pour séduire davantage les pays émergents?
Agadir doit étoffer son produit en terme d’attractivité et de variété. Nous avons des lacunes en ce qui concerne l’offre d’animation en général, de restauration à thèmes ou de parcs de jeux en particulier. Inverser cette tendance dans une station balnéaire comme Agadir est une de mes missions prioritaires à la tête du CRT. De nouveaux hôtels sont attendus dans les mois et les années à venir avec une ambition de qualité. Mon travail, c’est de conseiller, diriger et motiver les investisseurs pour étoffer notre offre d’animation, notamment.

L’offre d’animation est indispensable pour espérer une augmentation de la durée des séjours?
Un meilleur produit, plus varié, aurait évidemment une valeur ajoutée. Mais il n’y a pas un rapport de cause à effet aussi évident que vous le pensez. La baisse de la durée des séjours est, non seulement, liée à la crise économique, et ce, d’autant que nos premiers pays émetteurs sont les pays européens, là où la crise frappe le plus fort, mais aussi à la multiplication des vols low cost, au détriment des vols charters, qui offrent la possibilité aux touristes de modifier leurs séjours à tout moment.

Le manque d’animation est-il lié à l’omniprésence de l’offre All Inclusive?
C’est un long débat. Le All Inclusive est un mode de consommation apprécié et recherché par les touristes européens. Si on arrêtait le All Inclusive, les hôtels urbains perdraient 30% de leur taux de remplissage. Il n’y a pas de discussion sur le sujet. Je suis même très péremptoire. Certains hôtels ne fonctionnent qu’avec le All Inclusive...

L’explication est donc trop simple....
Non, il n’y a pas de fumée sans feu. Mais ce mode de consommation est ancrée dans le marbre. Pour contrer ce mode consommation, il aurait fallu trouver une autre issue. Interdire, c’est facile. Mais, il faut donner une alternative que nous n’avons pas su préparer. Il aurait fallu, il y a dix ou quinze ans,  aménager des zones à l’extérieur d’Agadir, à vingt ou trente kilomètres, afin de les dédier au All Inclusive.

Il n’y a donc pas de solution...
Il est temps d’ouvrir le débat du All Inclusive, à Agadir. Il convient aujourd’hui de s’asseoir autour d’une table pour une discussion franche et sincère permettant de définir les règles de jeu. Un hôtel All Inclusive doit être adapté à ce mode de consommation. Ce n’est pas le cas partout. C’est anormal qu’un hôtel bed and breakfast devienne du jour au lendemain All Inclusive. Ce débat n’a jamais eu lieu. Il faut l’organiser, le structurer pour mener une vraie réflexion. J’ai l’intention de l’ouvrir et de convaincre toutes les parties d’adhérer à cette discussion. C’est anormal que la Ville et les Tours Opérateurs soient perdants.

 

«Stagner en terme de nuitées, comme Agadir, n’est pas bon.
Mais, aller trop vite comme Marrakech, c’est dangereux.
A Marrakech, les hôtels s’entretuent. Les cinq étoiles
vendent au prix des quatre étoiles: on assiste à un véritable
bradage des prix. ce n’est pas ce qu’il faut souhaiter à agadir...»

 

Les Tours Opérateurs tancent la stagnation du nombre de lits, à Agadir, et même leur vétusté...
Certains produits doivent être métamorphosés pour connaître une seconde jeunesse, c’est évident. Mais il ne faut pas oublier que les Tours Opérateurs trouvent leur compte dans une plus grande capacité d’hébergement, ce qui leur permet de baisser les prix. L’exemple de Marrakech est frappant. Marrakech a connu ces dernières années une flambée du nombre d’hôtels. Aujourd’hui, les hôtels s’entretuent commercialement. Les cinq étoiles vendent au prix des quatre étoiles: on assiste à un véritable bradage des prix. Voilà le plaisir des Tours Opérateurs! Ce n’est pas ce qu’il faut souhaiter pour Agadir. Stagner, comme Agadir, n’est pas bon. Mais, aller trop vite comme Marrakech, c’est dangereux.

Marrakech n’est donc pas un exemple à suivre pour le président du CRT...
Il faut prendre ce qu’il y a de bon à Marrakech ou à Paris. Mais il faut en même temps éviter de faire les mêmes erreurs. Chaque région, chaque destination est unique. A nous de nous adapter. En revanche, nous sommes confrontés aux mêmes problèmes que les autres villes touristiques marocaines s’agissant du vieillissement de la flotte des taxis ou l’absence de toilettes publiques. Malgré les problèmes sociaux, on est dans l’obligation de trouver des alternatives et des solutions. On ne doit jamais oublier que nous travaillons sur des destinations touristiques mondiales, donc fortement concurrentielles.

Est-ce que la mer et le soleil sont toujours les deux plus sûrs atouts de la destination Agadir?
Dieu a donné un micro-climat, à Agadir. C’est le véritable supplément de bonheur. L’hiver, le thermomètre ne descend pas sous les 23 degrés et l’été, il dépasse rarement les 30 degrés. On doit capitaliser sur cet atout majeur. Mais, cela ne suffit pas. La nature humaine ne se rassasie pas d’un ou deux éléments. Il faut innover continuellement pour donner envie aux touristes de venir et surtout de revenir. D’ailleurs, nous avons lancé une enquête pour évaluer les taux de retour.

Vous êtes Directeur Génaral des Hôtels Atlas Hospitality, à Agadir. Comment se portent les unités dont vous avez la responsabilité?
Nos quatre unités se portent très bien. On a toujours de l’ambition de développement. On demande juste d’être accompagné. En tout cas, on est vraiment écouté par le Conseil Municipal et la Willaya. Nous sommes un véritable acteur économique et on travaille main dans la main avec nos partenaires.