Sabrina Ouazani fait sa place
Juin. 2009 \\ Par Jérôme Lamy

Sans faire de bruit, Sabrina Ouazani trace sa route. Dans Adieu Gary, aux côtés de Jean-Pierre Bacri, elle confirme son talent naissant, d’autant plus complet qu’elle brille au théâtre dans Ruptures. A découvrir tous les mardis à partir de septembre au théâtre Montmartre Galabru.

Toujours placée, jamais primée. Révélée dans L’Esquive (2004) - son premier rôle fut même consacré par une nomination pour le César du meilleur espoir féminin 2005 - et La Graine et le Mulet (2007), les deux films cultes d’Abdel Kechiche, Sabrina Ouazani a dû se contenter des miettes, laissant à Sara Forestier (L’Esquive) et Hafsia Herzi (La Graine et le Mulet) les paillettes.

Mais la jeune fille des cités, du quartier des 4000 à La Courneuve, n’a jamais abdiqué, persuadée que l’histoire repassera les plats et que son heure viendra. Inscrite par sa mère au casting de L'Esquive, elle est retenue par Abdellatif Kechiche qui tourne ce film dans le quartier des Francs-Moisins de Saint-Denis, sa ville natale.

Cette jeunesse dans le 93, avec ses parents d’origine algérienne, lui a ouvert l’esprit autant qu’elle lui a offert une vraie richesse intérieure. Si elle ne milite pas, ne revendique rien, on sent que les questions sociales et d’intégration escortent ses pas. C’est sans doute pourquoi elle a autant envie de défendre Adieu Gary, en salle depuis le 22 juillet, qui a remporté à Cannes le Grand Prix de la semaine de la critique. Dans cette fable sociale au milieu d’une cité ouvrière vidée de sa population, Sabrina incarne la copine de Yasmine Belmadi, décédé dramatiquement, deux jours avant la sortie du film, dans un accident de scooter. “C’est le plus beau film de ma carrière” dit Sabrina.

C’est aussi son plus beau rôle, celui qui met le mieux en valeur sa palette d’actrice complète, capable de faire passer du rire aux larmes. Dotée d’un charisme rare et d’un magnétisme puissant dans son regard aux couleurs orientales, Sabrina Ouazani est à l’orée d’une belle carrière. Trop polie et éduquée pour forcer les portes, trop réaliste - “Si je ne deviens pas comédienne, je rêve du métier de journaliste” dit-elle -, Sabrina Ouazani a déjà une belle réputation. “De sa génération, c’est sans doute la plus douée” dit Atmen Khelif, qui sera avec elle à l’affiche d’une série sur France 2, à l’hiver 2010. On pourra aussi voir Sabrina Ouazani dans Tenir tête de Julia Cordonnier, sur France 2 fin 2009, et dans Garçon manqué, à la rentrée, toujours sur France 2. Au cinéma, elle sera à l’affiche de Tangerine, de Irene von Alberti.

Mais le plus simple pour découvrir Sabrina Ouazani, c’est de se rendre tous les mardis à 21h, à partir de septembre, au théâtre Montmartre Galabru dont elle foule les planches pour la première fois depuis le 21 juin dernier. Sabrina Ouazani y donne, avec beaucoup de brio, la réplique à Matthieu Rey dans Ruptures de Caroline Nietsweski.

Ruptures, dont le succès ne se dément pas, est composé de deux pièces en un acte : Café de l’Homme et Epilogue. Le premier raconte l’histoire d’un couple au lendemain de la rupture, qui se retrouve à la terrasse d’un café pour s’expliquer. Dans le deuxième, un jeune cadre dynamique épuisé par sa journée et une jeune femme au foyer épuisée par la vacuité de son quotidien nous promettent une soirée explosive. “Forcément, je dis plein de vérités sur les hommes” rigole Sabrina. “Je me retrouve clairement dans le texte. Mais les femmes ne sont pas épargnées non plus... En tout cas, cette expérience au théâtre me donne vraiment des idées et des envies pour la suite...”