Jean-Edouard Lipa: Classe comédien
Février. 2009 \\ Par Jérôme Lamy

Jean-Edouard Lipa se rêve sur grand écran. Pas pour pour prendre une revanche sur ceux qui le condamnent à l’aune de son passé à la télé mais pour assouvir sa passion de la comédie. N’empêche, sans faire de bruit et sans prêter attention aux oiseaux de mauvais augures, il a déjà tracé sa route dans la famille du théâtre. Avec un talent, qui commence à être reconnu...

Autant démêler un écheveau que de faire une sélection des photos de Jean-Edouard Lipa. Beau gosse, angélique et vilain garçon, le jeune (28 ans) homme est clairement photogénique. On ne peut même pas se dire qu’on va mettre plein de photos pour faire un joli reportage, genre roman photos, car Jean-Edouard, qui a aussi la tête bien pleine, a vraiment des choses à dire. Pas sur Loft Story, qui l’a révélé au grand public en 2001 mais sur sa passion du métier de comédien, sur ses envies et ses rêves. S’il est DJ résident du Café Chic chaque mercredi et vendredi et du Darling’s, rue Beaubourg, tous les samedi, il ne s’envisage pas dans un autre costume que celui d’acteur.
Dans le quartier Montorgueil, on le connaît surtout pour sa passion... des mots croisés. Sport auquel il s’adonne régulièrement en terrasse du Rocher de Cancale. “J’adore Montorgueil car on peut être le plus seul au monde et discuter avec des gens ici...” dit celui qui vit dans le XIXe, à l’orée des Buttes Chaumont.
Issue d’une famille bourgeoise, d’une mère française et d’un père allemand, Jean-Edouard a la force de ceux qui savent où ils veulent aller et qui n’ont pas de temps à perdre à décoller des étiquettes délavées.

Clin d’oeil.- La passion du théâtre coule dans tes veines. Depuis quand es-tu attiré par les planches?
Jean-Edouard Lipa .- Je fais du théâtre depuis l’âge de 7 ans. J’habitais Aix-en-Provence et j’ai découvert cet art dans les MJC. A l’époque, j’avais deux rêves, soit être pilote de chasse, soit être comédien. Le choix a été vite fait car je n’avais pas le niveau d’étude suffisant pour briguer ce métier. Le plus dur a été de convaincre mes parents. Comme toute famille classique, mes parents recherchaient la sécurité pour moi. J’ai fait des études de droit mais ma voie était ailleurs. Le Loft m’a permis de venir vivre à Paris et d’assumer mes choix vis à vis de mes parents.

Et finalement, tu es monté assez rapidement sur les planches...
Rapidement non, il faut être patient dans ce métier. Il y a un océan entre une MJC de Province et une salle parisienne. J’ai donc bossé comme un fou la journée en suivant des cours de comédie au Studio Pygmalion et, le soir, je mixais dans les clubs parisiens. En 2004, j’ai débuté ma carrière de comédien au théâtre dans Le Talon d'Achille et dans le rôle de Jésus la Caille, à l'Espace Pierre Cardin d'après le roman de Francis Carco, avec Marie Laforêt.
En 2005 et 2006, j’étais à l’affiche dans Vade Retro à la Comédie de Paris, avant de jouer dans cette même salle Effets secondaires de Julie Arnold. Actuellement, je suis en tournée dans Le Bel Indifférent de Cocteau mis en scène par Thierry Harcourt.
Après des pièces de boulevard, ressens-tu le besoin de t’engager dans des rôles plus profonds.
En France, enfermer les gens dans des cases est un sport national. Si je ne change pas de registre, on me proposera toute ma carrière du théâtre de boulevard. En plus, ça ne me ressemble pas. Je suis un fanfaron, quelquefois un pitre dans la vie de tous les jours, mais je n’ai pas le talent de comique. J’ai envie de me diriger vers des choses vraies, engagées, profondes. Je pense avoir davantage ma place dans des univers plus sombres que le boulevard. En clair, j’ai envie de me mettre en danger.

Penses-tu être légitime et crédible aujourd’hui comme comédien?
Ma légitimité ou ma crédibilité, ce n’est pas à moi d’en parler. Je sais seulement que si mon parcours est atypique, j’ai travaillé d’arrache-pied. Je fais du théâtre avec passion, avec amour, avec envie et ça personne ne peut me l’enlever. Quand je suis sur scène, je ne donne pas l’impression que quelqu’un m’a poussé. Quoi qu’il en soit, je ne fais pas du théâtre pour l’argent. Alors, pour répondre à votre question, je pense que je suis assez légitime. Je galère autant que les autres mais d’une manière différente. Je dois prouver, prouver et encore prouver. Je n’ai pas le droit à l’erreur. Quand je suis bon, on dit que je suis moyen. Quand je suis moyen, on dit que je suis mauvais.

Est-ce que c’est frustrant?
Au contraire, ça me pousse à me dépasser pour relever ce défi. Jamais, je ne me contenterai du minimum syndical. Je suis impatient d’y arriver mais j’ai la patience pour arriver à vivre de ce métier d’acteur. J’ai la patience pour attendre que les professionnels se rendent compte que ce n’est pas parce que j’ai fait de la télé que je suis plus mauvais sur scène. Je ne fais pas l’unanimité, pas plus qu’un autre d’ailleurs, mais il y a des familles au théâtre qui commencent à me faire confiance.
As-tu parfois envie de tout laisser tomber et de faire autre chose de ta vie?
Des doutes, j’en ai tous les jours. Je me remets en question tous les jours. Mais je sens que ce métier est en moi. Faire autre chose est inconcevable. Au théâtre, je dis des choses que je n’arrive pas à dire la journée.

As-tu fait des choix de carrière que tu regrettes aujourd’hui?
J’ai un parcours forcément spécial mais je ne pense pas avoir fait d’erreurs. Je ne suis jamais tombé dans la facilité, dans un univers un peu people. J’ai refusé plein de propositions et je ne regrette rien. Certes, j’aurais pris de l’argent mais je serai grillé aujourd’hui. Je préfère privilégier le long terme au court terme....
Tu préfères passer une nuit avec Clara Morgane ou toutes les nuits avec Sophie Marceau.
Je pense que Clara Morgane a beaucoup d’expérience mais que Sophie Marceau a plus de choses à dire. C’est quand même sympa de pouvoir parler après avoir fait l'amour. Je pensais faire une interview pour Clin d’Orgueil pas pour Ardisson...

C’est d’autant plus difficile de décoller l’image d’Hélène et les Garçons que la série est multi rediffusée sur le câble...
C’est la meilleure crème anti-ride ! Les gens ont l’impression que je ne change pas physiquement et que je roule sur l’or. C'est assez troublant, d’ailleurs, comme phénomène. Parfois, les gens qui me croisent dans la rue me disent : ‘Jean-Edouard Lipa, vous avez vieilli’. Je leur réponds : ‘le temps passe, vous aussi’. Franchement, c’est drôle, surtout quand des hommes de quarante-cinq ans poursuivent : ‘quand j'étais petit, je vous regardais à la télé’. En fait, ils n’assument pas d’avoir regardé Hélène et les Garçons.

Est-ce que DJ est un vrai métier?
On ne se contente pas de passer les disques les uns après les autres, on répond à une vraie démarche artistique. Cinq heures debout sans bouger, déjà c’est très dur (rires). On est entouré de jolies filles et d’alcool, c’est très dur aussi... Plus sérieusement, être DJ, c’est être chef d'orchestre d’un établissement. C’est être dépositaire d’une couleur musicale.
Quel est ton univers musical?
Le trip-hop à l’image de groupe comme AIM ou Triton. J’adore l’esprit Nova, la culture décalée. Mon premier concert, c’était les Pink Floyd. J’avais 7 ans, j’étais sur les épaules de mon père, je n’oublierai jamais. Ce sont les premiers à avoir mélanger le rock et la musique électronique.

Ton job de DJ ne dessert-il pas tes ambitions d’acteur?
Absolument pas ! La couleur artistique est le dénominateur commun entre les deux professions. Asia Argento est DJ et personne ne remet en cause son talent. Etre DJ, c’est aussi monter sur scène. Il y a plein de comédiens qui sont barman le soir pour survivre. La musique est une seconde passion, qui me permet de subvenir à mes besoins. Mais la nuit, ce n’est pas ma vie. Je ne veux pas me perdre, ni mixer tous les soirs. J’ai d'autres rêves...

Forcément, ton rêve, c’est le cinéma...
Grave... Mon but, c’est de faire du cinéma ! Je commence à passer des essais relativement importants, ce que je ne faisais pas avant. Le cinéma, c’est une telle passion que j’écris des courts métrages l’après-midi... Mais les gens de cinéma ne savent pas que je suis comédien. Ils ne vont pas au théâtre : ça les emmerde.

Quel est le rôle dont tu es le plus fier?
Dans Le Bel Indifférent, je ne dis pas un mot. Un acteur, c’est quelqu’un qui doit pouvoir s’adresser au public sans dire un mot. Ce n'est pas si facile que ça. Je m’en suis bien sorti : j’ai eu de très bonnes critiques.

Est-ce que tu es parano?
A fond ! Justement, après les critiques positives dans Le Bel Indifférent, je me disais, il veulent dire que quand je ferme ma gueule , c’est beaucoup mieux... On m’a tellement mis de bâtons dans les roues, on m’a tellement reproché ce que j’ai fait à la télé, que je suis devenu parano... Je me suis beaucoup plus investi dans le théâtre que dans le Loft, pourtant on m’en parle encore. ça décuple ma parano...

Est-ce que tu te trouves beau?
Oui, je me trouve beau. C’est peut-être de la parano aussi mais à force de me le dire cent fois, je finis par y croire.

Est-ce que ton image a évolué ces dernières années?
Je vais dire quelque chose qui peut étonner mais le site facebook m’a permis de modifier mon image. Le but n’est pas seulement de happer des friends que tu connais mais des gens divers et variés. Je réponds à tout le monde sur facebook, ça m’a permis d’avoir une vraie proximité.

Donc, si une lectrice te propose un rendez-vous, tu promets de lui répondre?
Oui, il faut taper Jean-Edward Lipa avec un w...

Es-tu célibataire?

Oui, c’est une hygiène de vie...

 

Vraiment?
Non, pas du tout... Je suis ouvert à une histoire.

Si tu étais une couleur ? Le bleu car c’est le ciel, donc la liberté.
Une saison ? L’été car on se dénude.
Un pays ? La France, mon pays...
Une ville ? New York où tout est possible.
Un moyen de transport ? Je suis motard, donc une Triumph.
Une boisson ? Vodka pomme, c’est ce que je bois toute le temps.
Un plat? Le couscous pour mon côté épicé.
Une chanson? J’aurais voulu être un artiste.
Ta dernière colère ? Il y a une fille qui me harcèle au téléphone, c’est horrible.
Un trait de caractère ? La générosité.
Un film culte ? American Beauty avec Kevin Spacey.
Un objet ? Mon téléphone portable car je ne m’en sépare jamais...
Ta qualité préférée chez une femme? La générosité, c’est vraiment agréable dans tous les sens du terme....
Ce qui est rédhibitoire chez une femme ? Les mauvaises odeurs...
Si tu pouvais changer quelque chose dans ton physique... Rien, je me sens bien...
La partie de ton corps que tu préfères? Mes yeux.
Le talent que tu voudrais avoir? La créativité innée.
Tes dernières vacances ? Cet été, au Cap Ferret...
Ton premier CD ? Dire Straits, Money For Nothing.
Dernier CD ? "Oracular Spectacular" de MGMT.