Hafsia Herzi, à la folie
Juillet. 2008 \\ Par Jérôme Lamy

En à peine deux films, autant de récompenses, une critique unanime, Hafsia Herzi s’est déjà imposée comme l’héritière des grandes actrices françaises.

Assise sur un banc, rue Pierre Lescot, un jus de fruit à emporter, à la main, Hafsia Herzi est pile poil à l’heure. Rien d’étonnant: c’est une manie chez elle. La surprise, c’est qu’elle n’est pas seule. Accompagnée de sa meilleure copine, la jeune actrice Sabrina Ouazani, Hafsia rayonne.
Normal, tout va bien pour elle: Isabelle Adjani l’a appelée pour la féliciter après son César, Libé l’a comparée à Bonnaire et elle a dans un coin de la tête un projet avec Béatrice Dalle, un de ses modèles avec Emmanuelle Béart. Ses yeux sont incandescents et irradiants, son regard troublant et magnétisant. Elle accepte de siroter un Coca à la terrasse du Père Fouettard, le temps d’une interview où la bonne humeur s’est invitée à notre table.

Clin d’œil.- Comment allez-vous, Hafsia?
Hafsia Herzi.- Je suis un peu fatiguée par la promo intensive de Française mais le moral est bon. Je ne vais quand même pas me plaindre.

Que diriez-vous à ceux qui hésitent à aller voir Française?
Je leur dirai que Française est un beau film, émouvant et poétique. Un film qui parle de la vraie vie, des vrais gens. En plus, c’est un premier film, celui de Souad El Bouhati. C’est aussi un film d’auteur et un film d’actualité. ça fait pas mal de raisons, non?

Dans Française, vous jouez le personnage de Sofia, une jeune fille qui rêve de quitter le Maroc pour retourner en France. Qu’auriez-vous fait à sa place?
C’est difficile de répondre à cette question d’autant que je suis née en France et que je n’ai jamais été déracinée. Ceci dit, on oublie toujours de penser aux maghrébins qui s’installent en France et qui n’arrivent pas à s’adapter.

Etes-vous sensible aux problèmes de la communauté maghrébine en France?
Je suis sensible à toute forme de souffrance et de discrimination, y compris celle-là, évidemment. Vous savez, je suis une jeune fille arabe, qui est fière de ses origines. Mais on est tous mélangés, on est nés en France: on est tous les mêmes.

Vous répétez souvent que vous n’avez pas envie de jouer la beurette de service du cinéma français...
Ce n’est pas parce que je parle arabe, que je suis obligée de me cantonner aux films arabes, aux rôles de la jeune maghrébine tabassée ou victime d’un mariage forcé. Ce n’est pas une caricature, c’est la réalité des scénarios qu’on m’a déjà proposés. J’en ai marre de cette image de la femme maghrébine. Pourquoi ne me proposerait-on pas le rôle de Cendrillon? De toute façon, je trouve ça très discriminatoire de ne pas ouvrir les castings à toutes les communautés. Personne n’en parle. Il faut que ça change !
Depuis votre César du meilleur espoir, vous êtes fréquemment sollicitée par les réalisateurs. Comment faites-vous vos choix?
Je lis tous les scénarios. Et j’en parle à mon agent, à Sabrina et aussi à ma maman.

Est-ce que vous refusez beaucoup de propositions?
Oui, la difficulté, c’est de faire le bon choix. Il ne faut pas toujours dire non et ne pas accepter n’importe quoi. Il faut savoir cultiver une sorte de mystère mais ne pas se faire oublier pour autant.

Vous serez à l’affiche d'Un Homme et son chien en janvier 2009, avec Belmondo. Quel effet ça fait de tourner avec un tel monstre sacré?
Forcément, c’est un honneur et une pression supplémentaire. C’est un monsieur très drôle et très simple. En plus, ma maman est vraiment fan. Elle a fait encadrer toutes mes photos avec lui. Mais dès que la caméra tourne, on oublie tout et on se concentre sur son personnage. En plus, Françis Huster et toute son équipe, étaient vraiment géniaux.
On vous sent très proche de votre maman...
Oui, elle m’a tout donné, elle a fait tous les sacrifices pour que je puisse participer aux castings pour faire de la figuration à Marseille. D’ailleurs, je croyais être destinée à des rôles de figurantes. Je l’ai tous les jours au téléphone et je descends à Marseille dès que mon emploi du temps le permet. Elle se fait du souci pour moi. Il y a peu, elle m’a dit :”si un homme te propose des bonbons, surtout, tu refuses...”

Du Prix Marcello Mastroianni, à Venise et à la montée des marches à Cannes il y a quelques jours, vous avez vécu une ascension extraordinaire. Quel est le souvenir le plus fort?
Je vais vous surprendre mais le plus fou, le plus surprenant, c’est ma récompense à la Mostra de Venise. Je me suis décomposée. Sans doute parce que c’était la première fois.

En fait, c’était comme un premier baiser...
Non, c’était plus fort car mon premier baiser n’est pas un bon souvenir. Pourtant j’avais pris le temps d’attendre (rires)...

Vous avez monté les marches à Cannes pour la présentation de Française en marge du Festival. Quel regard portez-vous sur cet événement?
C’était rigolo de monter les marches, de faire autant d’interviews pour la promotion de Française mais les paillettes ce n’est pas forcément mon truc. La prochaine fois, que je retournerai à Cannes, ce sera pour défendre un film en compétition. En fait, moi je suis surtout une bosseuse. Mon plus grand souhait est de devenir scénariste et réalisatrice. Il faut donc travailler. Depuis que je suis gamine, j’écris des histoires. Encore aujourd’hui, quand je me balade dans Paris, dans les parcs ou les jardins, dès que j’ai une idée, je rentre vite chez moi pour écrire.

Quel sont vos quartiers favoris?
J’adore Ménilmontant, les Buttes Chaumont et me promener à Châtelet. J’aime faire les boutiques dans le Forum des Halles et aller le dimanche regarder un film à l’UGC Ciné Cité du Forum. J’aime cette énergie, ces gens qui se croisent aux Halles, ce mélange, cette diversité.

Comment vous imaginez-vous dans 20 ans?
Ah, je serai vieille ! Avec des enfants. Pour moi, la famille, c’est important. Je ne vais quand même pas vivre seule.

INTERVIEW DÉCALÉE

Quelle est votre couleur préféré? Le rose: chez moi, j’ai mis du rose partout.
Si vous étiez une saison? L’été.
Un pays? La France.
Une ville? Marseille pour les odeurs, mes amis, mes racines, mon neveu...
Un moyen de transport? La marche à pieds. Je ne prends presque jamais le métro à Paris. J’adore marcher dans Paris.
Une boisson? Un Coca.
Un aliment? Les lasagnes à la bolognaise: j’adore la cuisine italienne.
Une chanson? Mon Amie la Rose de Natacha Atlas.
Un dernier gros fou rire? En voiture avec Sabrina: on chantait comme des folles en réinventant les paroles des chansons. J’ai failli vomir dans la voiture.
Un dernier coup de colère? La malhonnêteté me met en colère. Mais après je regrette de m’être emportée.
Un trait de caractère? Gentille et passionnée.
Un film culte? La Graine et le Mulet.
Un héros contemporain? Ma maman.
Un objet? Une couverture pour l’instant magique de chaleur.
Une qualité préférée chez un homme? Galant et obéissant.
Ce qui est rédhibitoire chez une homme? La méchanceté et l'égoïsme.
Que possédez-vous de plus cher? Ma maman.
Si vous pouviez changer quelque chose dans votre physique? Ma taille mais je ne suis pas complexée quand même.
Le talent que vous voudriez avoir? Savoir chanter. J’aimerais vraiment jouer le rôle d’une chanteuse même si je n’aime pas ma voix.
Votre dernière folie financière? Aucune, je suis une fille très sage.
Votre sonnerie de portable? Aucune, je suis sur vibreur.
Vos dernières vacances? C’est vieux: à Marseille, l’été dernier.
Votre premier CD? Un groupe de boys band mais j’étais gamine...
Votre dernier CD? Léa, une Marseillaise, chanteuse de hip-hop